Rock ‘n’roll altitude…Au sujet de Johnny Hallyday.« Que je t’aime, que je t’aime… ». Amen.

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Quelques fidèles amis du blog musical offrent leurs sentiments après l’hommage populaire fait ce samedi 9 décembre à Johnny Hallyday et à la musique qu’il a fait aimer. Que dire de la rock’n’roll attitude au regard du regard chrétien?

A suivre durant les jours qui viennent.
Georges GOUDET, le 10/12/2017
Auteur, compositeur, interprète.
Où t’en vas-tu Johnny ?
Comme des millions de Français, la mort de Johnny Hallyday m’a d’abord laissé sans voix. Cet artiste n’incarnait-il pas tous nos désirs : aimer passionnément et être aimé tout autant, suivre ses rêves et ses projets même s’il fallait pour cela prendre des sentiers à risques, enfin rester libre dans sa tête et si possible, indestructible ? La rock’n’roll attitude en somme dans un monde qui nous semble si souvent sec, éteint ou aseptisé.
Après vu Johnny Halliday sur scène, quel chanteur, inconnu ou célèbre, ne s’est-il pas tout à coup senti tout petit ? Son talent, sa force, son énergie, sa voix tellement exceptionnelle en faisait un modèle, un idéal que nul ne saurait jamais atteindre. Mais l’hommage national que le peuple de France lui a rendu en ce 9 décembre, ses funérailles retransmises sur toutes les chaînes de radio et de télévision m’ont soudain fait réaliser que Johnny était beaucoup plus qu’un chanteur d’exception.
Un certain nombre d’entre nous ont reçu mission d’annoncer l’Evangile en musiques et en chansons. Avec l’au-revoir à Johnny, je mesure une nouvelle fois que la frontière entre chanson dite « profane » et chanson « inspirée » est poreuse, voire artificielle. Toute sa vie, Johnny Halliday a été, à sa façon, un baladin, un missionnaire de l’amour. Et puis, il s’adressait au petit peuple, aux sans-voix, à ceux que l’Eglise a tant de mal parfois à rejoindre. Quelle leçon ! Déjà, au cours de ses concerts, j’ai ressenti cette proximité avec un public qui chantait avec lui et d’une seule voix une même et belle espérance. J’ose parler de « communion » fraternelle, préfigurant ce Royaume d’amour annoncé par un certain Jésus, le Nazaréen.
Oui, comme le père Gaston Pietri (théologien) a osé l’écrire et sans aucune forme de récupération : « Un beau chant d’amour peut devenir prière, unissant le temps d’une chanson celui qui croit au ciel, et celui qui n’y croit pas … et ces chansons accompagnent nos vies, dans la joie comme dans la peine. » (Ces chansons qui parlent à mon cœur)
« Que je t’aime ! Que je t’aime ! Que je t’aime ! » Merci Père Benoist de Sinety, vicaire général du diocèse de Paris, d’avoir osé utiliser les mots de cette chanson pour annoncer le dessein même de Dieu à des millions d’amis, célèbres et anonymes, réunis pour un dernier « A Dieu ».
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Brigitte et Jean Paul ARTAUD
Auteurs, compositeurs, interprètes. Pour notamment le CD Rock Évangiles (ADF-BAYARDMusique)
Le blues et le rock peuvent être vecteurs des psaumes d’aujourd’hui.
Johnny fait partie de notre histoire. Depuis l’âge de 15 ans nous avons repris ses chansons… parfois à tue-tête dans nos chambres d’adolescents. Elles ont accompagné nos amours, nos questions, nos déchirures, nos rêves et nos passions…
La puissance des textes et des musiques portés par une voix et un timbre extraordinaire qui lâche tout et se donne à fond… Johnny est bien un phénomène qui a  par sa ténacité, son envergure,  son énergie et sa force, transmis une véritable espérance à plusieurs générations.
Le blues et le rock expriment de manière viscérale les cris, les joies, les souffrances et attentes des gens. En ce sens, ils peuvent être vecteurs des psaumes d’aujourd’hui.
Le CD ROCK EVANGILE que nous avons enregistré il y a 5 ans, nous a permis d’exprimer la beauté de l’évangile avec la puissance du rythme rock et du blues… un style musical qui vous oblige à chanter dans le fond du temps, comme pour retenir et s’imprégner de la parole, lui donner encore plus de force quand elle jaillit… un style qui cogne au cœur et qui oscille entre fragilité et puissance… Dieu se fait proche, il habite nos émotions qui sont elles-mêmes cadeaux de Dieu.
rock and roll attitude, cette chanson écrite par Michel Berger et interprétée par Johnny nous dit:   » Et pour garder en toi Une rock’n’roll attitude, ne reste pas chez toi avec tes certitudes…Le risque de l’amour passe par l’amour du risque… Vivre, tous les moments qu’on a rêvés de vivre que ça aime, que ça tienne, que ça casse… Respirer chaque minute qu’on respire…. Garde toujours en toi une rock’n’roll attitude « 
Un beau programme, pour les chrétiens que  modestement nous sommes, avec nos doutes et nos questions, mais avec le désir de toujours avancer, vivre au présent de la rencontre et garder notre ciel ouvert sur la richesse des différences…
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Charles Wright
Auteur.
C’était beau de voir l’Église de Jésus accueillir
Franchement, les mots manquent. Je suis allé à la Concorde, à Paris,  pour me sentir moins seul, me réchauffer auprès de centaines de milliers de français venus, comme moi, renouer avec leur part d’enfance. Dans l’air, il y avait un mélange étrange de mélancolie noire et de joie. Habillés en noir, comme des anges déchus, les rockers de Johnny faisaient résonner la bande-son de la France. On a beaucoup pleuré, beaucoup dansé, beaucoup crié. L’enterrement de Johnny est le tombeau de l’enfance.
Et puis, cinquante ans après qu’elle ait interdit à la môme Piaf les honneurs d’une cérémonie religieuse, c’était beau de voir l’Église de Jésus accueillir et exhausser cette émotion populaire, en communion avec tous les fans de Johnny, ce peuple des petits, des pauvres, des humbles, qui sont les préférés de Dieu.
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Jo Akepsimas
Auteur, compositeur, interprète.
Le blues, « Pour dire Dieu et puis l’amour ». 
Que dire de Johnny ? On a tout dit sur lui. Une véritable « idole » de beaucoup de francophones. Il avait une voix puissante, souple, expressive. Se dégageait de lui une force animale. Il a eu l’intelligence de s’entourer d’excellents musiciens et de transposer en français les couleurs du blues et du rock américains. J’ai toujours eu une faiblesse pour «  Toute la musique que j’aime elle vient de là, elle vient du blues ». Le blues, avec la simplicité de sa structure harmonique, est à la racine d’un grand nombre de styles musicaux. « Pour dire Dieu et puis l’amour ». Et les versions orchestrales de cette chanson ont été une réussite.
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Antoine Clamagirant, président des AMA (Angels Music Awards, de la musique inspirée)

Une communion incroyable avec son public
La carrière hors norme de Johnny Halliday a été unanimement saluée, à juste titre depuis l’annonce de sa mort mercredi dernier. Ses prestations hyper professionnelles du point de vue de la technique, de sa voix, et des accompagnements magiques étaient mêlés  à une communion incroyable avec son public qui reposait certainement sur une gentillesse personnelle et naturelle chez lui. D’où cette gigantesque émotion en réponse à cette bienveillance, en complément de son talent.
Et la rock n’roll attitude au regard du message chrétien ? Je dirais qu’il a su exploiter les dons artistiques qu’il a reçus. Peut-être lors de son baptême ? Dans sa magnifique « lettre aux artistes », Saint Jean-Paul II, explique que « lorsque l’artiste façonne un chef-d’œuvre, non seulement il donne vie à son œuvre, mais à travers elle, en un certain sens, il dévoile aussi sa propre personnalité ». La longévité de sa carrière a sûrement été pour lui un révélateur sur lui-même. « Je resterai chrétien » disait-il, que la Croix qu’il portait lui ouvre les portes du ciel.
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Daniel Facerias.
Auteur, compositeur, interprète.
Les racines du blues sont dans les psaumes.

Le paradoxe du rock’n roll c’est qu’on l’a associé au diable qu’alors que cette musique est éminement spirituelle. Les racines du blues sont dans les psaumes et Johnny le savait bien. Au delà des paillettes du show business il a toujours maintenu cette racine et sa voix exceptionnelle en était le témoin vivant, qui va rester au delà des modes.
Cette communion autour de lui rétabli certaines choses et les musiciens exceptionnels qui jouaient dans le choeur de l’église de La Madeleine pendant la prière universelle rendaient hommage et libérait le chant de ces esclaves des champs de coton de Louisiane… Si Johnny avait préparé ce show c’est exceptionnel au delà de tout sentimentalisme , un vrai sens, une véritable rock’n roll attitude.
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Hubert Bourel
Auteur, compositeur, interprète.
Quelque chose de….?
J’avais décidé de mettre la TV en sourdine pendant que je faisais mon courrier mais peu à peu, j’ai été pris par l’ambiance toute particulière de cette retransmission des funérailles de Johnny.  Quelque chose de spécial se dégageait de cette retransmission : Bien sur, l’Église a fait ce qu’elle sait faire de mieux et par la voix de Mgr Benoist de Sinety, elle a accueilli une famille en deuil et des amis meurtris, leur a redit l’espérance de Jésus Christ et souligné que toute vie humaine a du prix au yeux de Dieu. Bien sur, les musiciens de Johnny, parmi les meilleurs de France (renforcé par Matthieu Chedid et un chœur plus classique), ont su rythmer cette célébration avec « l’immense talent de la bonne note au bon moment ». Bien sur, les textes étaient lu par les meilleurs comédiens connus de notre pays…La réalisation était parfaite : images et commentaires …
Cependant, ce sentiment de parfaite harmonie et, pour tout dire, « de communion » semblait venir d’ailleurs. Ne connaissant pas l’homme,  j’ai repensé  au répertoire de l’artiste qui a touché tant de gens . Que disent les chansons de Johnny? Bien souvent elles sont le cri de celui qui se bat et bien souvent contre lui-même …Celui d’un être qui sort de la boue comme un Adam (le terreux) étonné, écorché de sentir dans ses entrailles un cœur qui bat et l’encombre parfois. De celui qui « même au fond de la cale cherche la lumière d’un soleil » entouré d’ennemis, l’esprit broyé par la difficulté d’être au monde il se bat parfois ébloui de la beauté du monde ou de l’intensité d’une vie vécue « à fond ». En bref, c’est une rockn’roll-attitude très psalmique non ? On est loin du no-futur d’un coté ou du yéyé sautillant de l’autre.
Le répertoire de cet artiste (et c’est peut-être le plus grand de ses talents) a été forgé de façon unique.  Pour la partie musicale, si sa « musique vient du blues » comme il le dit lui même, il s’agit d’un blues vivant, d’une l’énergie créatrice, pas simplement la reprise de standards. Au génie musicale américain, il a allié le meilleur de la production française c’est à dire ses poètes et ses paroliers .
Relisons simplement  Michel Berger : « A vous autres, hommes faibles et merveilleux
Qui mettez tant de grâce a vous retirer du jeu
Il faut qu’une main posée sur votre épaule
Vous pousse vers la vie, cette main tendre et légère…Cette force qui nous pousse vers l’infini … Quelque chose de Tennessee … »
Je m’étonne toujours du génie de ces mots qui semblent à la fois embrasser  « le damné de la terre » et « le chevalier d’une impossible quête ». Ce répertoire  était interprété par un homme debout à la voix, oh combien charnelle et généreuse, qui ne s’excusait pas de son humanité, donnée à son public.
Pour finir sur une anecdote toute personnelle Je prendrai bientôt pour l’animation d’un mariage le « Oh Marie si tu savais » de De Palmas (la chanson de Johnny la plus vendue d’ailleurs…Sourire) Après relecture, avec les fiancés, on ne chantera pas les couplets qui font « un peu veillée d’armes »,mais  on a aimé cette idée que Marie qu’on a si souvent « couronnée d’étoiles » puisse aussi avoir « les bras nus »… ». Cela nous l’a rend plus proche » m’ont confié les fiancés. J’ai trouvé cette remarque forte intéressante et je me suis dit « pourquoi pas » ? Sur ce point, Johnny en sait maintenant peut-être plus que nous…
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P.Pierre Eliane.
Auteur, compositeur, interprète. Religieux carme.
Chacun a pu trouver sa place dans cette « catholique attitude »…

La réelle communion m’a surtout semblé être celle autour du corps à l’église de la Madeleine…
Dans l’extraordinaire force de la liturgie des obsèques.
Chacun a pu trouver sa place dans cette « catholique attitude »…
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P.Pierre Amar, prêtre et blogueur.
Que te dire de plus ?
Peut-être ceci : que la France entière était à l’église aujourd’hui. Et tout ça grâce….. à un rockeur !
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À propos de ce blog

  • Dans un pays où, dit-on, tout ou presque, finit en chansons, d’innombrables voix montent du chœur des humains jusqu’à Dieu. Au gré de voies parfois étonnantes. La chanson n’a pas seulement vocation au divertissement et aux standards formatés. Elle ouvre à bien plus grand qu’elle, évoquant les musiques du Paradis…

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À propos de l’auteur

  • Robert Migliorini, religieux assomptionniste, journaliste, a tenu au sein du service culture de La Croix la rubrique musiques actuelles, de 1999 à 2009, et a assuré durant dix ans, en alternance, la rubrique quotidienne Fidèle au poste.

    Musicien, il a contribué au numéro de juillet 2009 (223) de la revue trimestrielle Christus consacré à la question de la musique, « une voie spirituelle ? ».

    Prépare un essai consacré à la chanson religieuse. Membre du jury des premiers Angels Music Awards 2015.

    Le dimanche à 8h03 sur le réseau RCF (Radios chrétiennes francophones) il programme l’émission Un air qui me rappelle.

    Robert Migliorini est également chroniqueur musical pour le mensuel Panorama.

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