Jean-Guilhem XERRI. A l’écoute des vraies musiques de l’âme.

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Jean-Guilhem Xerri. Psychanalyste, médecin, auteur. Vient de publier « Prenez soin de votre âme » (éditions du Cerf).

Jean-Guilhem Xerri est psychanalyste et biologiste médical des hôpitaux. Ancien interne et diplômé de l’Institut Pasteur et de l’École supérieure de commerce de Paris, Jean-Guilhem Xerri est depuis longtemps engagé dans le milieu associatif. En 1995, il rejoint l’association Aux captifs la libération, qui rencontre et accompagne les personnes de la rue. C’est le cardinal Lustiger qui lui demandera d’en assurer la présidence en 2005, à la mort de son fondateur, le père Patrick Giros. Il donne des conférences et anime des retraites. Son livre « A quoi sert un chrétien ? » (Le Cerf) a reçu le prix de l’humanisme chrétien. Il vient de publier « Prenez soin de votre âme, petit traité d’écologie intérieure ». (Le Cerf). Avec succès. Dès les premiers siècles du christianisme, les Pères du désert ont développé une véritable « pharmacie de l’âme » dont la vertu est de contribuer à la santé spirituelle. Leur médecine, considérée comme « l’art des arts et la science des sciences », est faite de sobriété, de pratiques méditatives et d’hospitalité.
Elle apparaît d’une urgente actualité et d’une étonnante pertinence. Il interviendra à Lourdes lors du prochain pèlerinage du Rosaire des Dominicains, les 3, 4 et 5 octobre 2018.

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Quelles sont les musiques, anciennes ou récentes,  évoquant Dieu que vous avez entendues  et appréciées?

Jean-Guilhem XERRI: Chopin, Chopin et Chopin, et accessoirement Bach. Je reconnais que ça manque singulièrement d’originalité mais je trouve que ces compositeurs nous donnent à entendre une véritable musique de l’âme.

Selon vous, Dieu aime-t-il la musique ?

J’imagine qu’il aime la musique qui élève l’homme et ouvre son âme.

Au paradis quelles musiques y entend-on ?

Un silence habité.

Quelles sont les musiques qui, selon vous, invitent à la prière ?

Je suis sensible aux chants de la communauté de Taizé, ainsi qu’à la musique de la liturgie orthodoxe. Ils m’aident à entrer vers l’intériorité.

Que chantent les anges musiciens ?

Des airs vivants et consolants !

Si la prière était une chanson, une musique, laquelle choisiriez-vous ?

La musique du film « Cinema Paradiso » d’Ennio Moricone. Il y a de la joie, de la légèreté, et en même temps de la nostalgie et de la gravité, de l’élan et de la lenteur.

Qu’aimeriez vous « chanter » à Dieu en le rencontrant ?

Demeurer dans un profond silence pour profiter de Sa présence.

Quelles sont dans votre discothèque personnelle les musiques, les chansons qui sont vos préférées. Les dix musiques et chansons à emporter sur une île déserte?

-La bande originale de Rocky, « The eye of the tiger »
-Your Song et Don’t Let The Sun Go Down On Me, d’Elton John
-L’intégrale de Muddy Waters
-L’album « It Serve You Right to suffer », de John Lee Hooker
-La passion selon saint Jean, de Bach
-Adagio en G mineur, d’Albinoni
-Concerto N°40 de Mozart
-Les Nocturnes de Chopin, en particulier la N°2
-L’hymne acathiste.

Quel est le refrain qui vous a le plus marqué ?

I will survive, de Gloria Gaynor

Quels sont les grands auteurs, compositeurs ou interprètes qui comptent pour vous ?

Comme compositeur : Chopin.
Comme interprète : l’orchestre West-Eastern Divan Orchestra qui réunit des musiciens palestiniens, arabes et israéliens pour promouvoir la paix et le dialogue, à l’initiative et sous la direction de Daniel Barenboim et de l’écrivain chrétien Edward Saïd.

La dernière fois où vous avez été ému en écoutant une musique, une chanson, laquelle était-ce ?
La nocturne N°2 de Chopin, immanquablement

Si Dieu était une chanson, une musique, laquelle serait-ce ?

L’adagio en G (Sol)  mineur d’Albinoni.

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A lire dans LA CROIX du 22 mars 2018

SPIRITUALITÉ : Des maladies de l’âme à la paix intérieure

Avec une remarquable pédagogie, le psychanalyste et biologiste médical Jean-Guilhem Xerri analyse les racines spirituelles de la crise de notre société et propose un chemin d’intériorité à l’école des Pères du désert.

jg-xerriPrenez soin de votre âme. Petit traité d’écologie intérieure,
de Jean-Guilhem Xerri,
Éditions
du Cerf, 400 p., 20 €

Stress, surmenage, addictions en tous genres, troubles dépressifs, angoisse du vide et de l’ennui, sentiment de ne « plus avoir le temps de rien »… Dans une société d’hyperactivité, d’hyperconnexion et d’hyperconsommation, comment (re)trouver la paix intérieure ? Depuis plusieurs années, les livres de développement personnel ont envahi les rayons des librairies, cherchant, chacun à sa manière, à répondre à la quête contemporaine d’une santé qui englobe tout l’être – et pas seulement le corps.

Des pathologies du XXIe siècle

Jean-Guilhem Xerri prend lui aussi très au sérieux ce mal-être diffus et ces souffrances psychiques dont, comme psychanalyste et spécialiste de l’exclusion – il fut notamment président de l’association Aux captifs la libération –, il est un témoin privilégié. Mais à ses yeux, la racine de ces « pathologies du XXIe siècle » est bien plus profonde que ce que la psychanalyse ou la sociologie peuvent en dire. « Nous sommes tombés dans l’hyperconsommation… car nous avons perdu le sens », diagnostique-t-il.

Autrement dit, notre façon de vivre est le produit de la vision que notre société a de l’homme, l’homme des sciences humaines résumé à ses déterminismes ou l’homme des neurosciences, réduit à son cerveau. Dans tous les cas, ces anthropologies matérialistes l’ont amputé d’une partie essentielle, sa dimension spirituelle. Or, affirme l’auteur, en niant cette dimension, « l’homme blesse son identité et ses dynamismes profonds, et peut développer certaines pathologies ».

Proposant au lecteur, croyant ou non, de partir « à la recherche d’une vision plus complète de l’humain », Jean-Guilhem Xerri s’oriente vers la « science de l’âme » développée par les premiers moines chrétiens, les Pères du désert. Ces hommes et ces femmes qui ont été des thérapeutes et des guides spirituels pour leurs contemporains « n’ont pas pris une ride », affirme-t-il, car « ce qu’ils ont éprouvé dans leur être, c’est ce qui traverse tout le genre humain ».

La grande tradition chrétienne de l’intériorité

Rien d’une énième recette de développement personnel, ce que visent les Pères du désert va bien au-delà : c’est le développement de la personne tout entière, corps, âme (psychisme) et esprit, fondé sur ce principe dynamique que « l’humain est inachevé à la naissance et qu’il est appelé à faire advenir son humanité ».

Dès lors, si la santé est fondamentalement l’alignement corps-âme-esprit, un dérèglement de ces trois pôles de l’homme et de ses facultés (imagination, intelligence…) provoquera inéluctablement des maladies spirituelles. Avidité, vanité, acédie… « Les maladies d’origine spirituelle telles qu’elles ont été identifiées, répertoriées et comprises par les Anciens sont bien présentes aujourd’hui », repère Jean-Guilhem Xerri, établissant finement des parallèles avec les maux dont souffre l’homme moderne. L’auteur réhabilite ainsi et met à la portée du lecteur moderne la grande tradition chrétienne de l’intériorité, faite de sobriété, d’hospitalité, d’attention et de pratique méditative.

Faire l’expérience de son « être profond »

Particularité de cet ouvrage d’une remarquable pédagogie, chaque chapitre se clôt par un « intermède ». Le thérapeute guide son lecteur dans des exercices pratiques pour prendre du recul avec les modes de vie « fous » que la société lui impose et faire une expérience de son « être profond », repérer les maladies spirituelles dont il souffre, s’approprier les conseils des Pères du désert les plus à même de l’aider à retrouver une « écologie intérieure ».

Au lecteur qui craindrait de tomber dans un vain égotisme, ce livre est un précieux rappel de ce qui distingue l’amour excessif de soi – la philautie qu’épinglent les Pères du désert – du bon narcissisme, celui qui permet de se construire et d’entrer dans une saine relation avec les autres. Bien plus, il révèle la dimension éthique de ce travail sur soi – « prendre soin de son intériorité est intimement et indissolublement lié au respect de la planète ». Un chemin incontournable pour l’Église si elle veut rejoindre l’homme moderne dans sa quête d’intériorité.

Céline Hoyeau

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À propos de ce blog

  • Dans un pays où, dit-on, tout ou presque, finit en chansons, d’innombrables voix montent du chœur des humains jusqu’à Dieu. Au gré de voies parfois étonnantes. La chanson n’a pas seulement vocation au divertissement et aux standards formatés. Elle ouvre à bien plus grand qu’elle, évoquant les musiques du Paradis…

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À propos de l’auteur

  • Robert Migliorini, religieux assomptionniste, journaliste, a tenu au sein du service culture de La Croix la rubrique musiques actuelles, de 1999 à 2009, et a assuré durant dix ans, en alternance, la rubrique quotidienne Fidèle au poste.

    Musicien, il a contribué au numéro de juillet 2009 (223) de la revue trimestrielle Christus consacré à la question de la musique, « une voie spirituelle ? ».

    Prépare un essai consacré à la chanson religieuse. Membre du jury des premiers Angels Music Awards 2015.

    Le dimanche à 8h03 sur le réseau RCF (Radios chrétiennes francophones) il programme l’émission Un air qui me rappelle.

    Robert Migliorini est également chroniqueur musical pour le mensuel Panorama.

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