Gabriel Ringlet, prêtre, théologien et écrivain, a été vice-recteur de l’université catholique de Louvain (Belgique). Passionné de littérature et fin analyste du récit médiatique en ses contours et pratiques, il pratique la conversation avec ses contemporains. Soucieux de partager des paroles fortes, tout en préservant la liberté intérieure de son interlocuteur (trice). Il assure régulièrement des commentaires d’Evangile pour LA CROIX.
Son oeuvre publiée est abondante (notamment chez Albin-Michel) , explorant les territoires défrichés par le regard des artistes, des poètes et des théologiens. Il a reçu en 1999 le prix des libraires religieux pour l’essai « L’Evangile d’un libre penseur. Dieu serait-il laïque? ».
Il aime aussi la chanson et n’hésite pas à en souligner la richesse et l’à-propos pour mieux parler de soi et du monde. De la terre au ciel. Ainsi, Gabriel Ringlet a récemment co-écrit avec Mannick (Marie-Annick Retif) un dialogue à deux voix égales intitulé « Entre toutes les femmes » (Desclée de Brouwer, 336 p., 18 €). A partir de textes de chansons de Mannick, leurs esprits vagabondent et se confrontent, entre utopies et constats plus ou moins rudes. « Elle chante et il écrit », précise la notice de cet essai peu commun. Souvent branché sur l’actualité, le duo s’implique et ne mâche pas ses mots. A la première personne.
Ils donnent à l’occasion des conférences-concerts communs.
Son éditeur signale enfin que depuis son lieu de « résistance poétique », au prieuré de Malèves-Sainte-Marie en Brabant wallon, Gabriel Ringlet encourage de nouveaux rendez-vous entre chrétiens et laïques, accueille des artistes et des écrivains et invite chacun « à parcourir les chemins de l’imaginaire ». A 68 ans cette année.
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– Quelles sont les chansons, anciennes ou récentes, évoquant Dieu que vous avez entendues et appréciées?
– Gabriel RINGLET: Du côté d’hier, je pense à la chanson Mon Dieu, de Michel Vaucaire, interprétée par Edith Piaf.
« Mon Dieu ! Mon Dieu ! Mon Dieu !
Laissez-le moi
Encore un peu,
Mon amoureux ! »…
Je songe aussi à Abd al Malik et à sa chanson l’Alchimiste.
Cela dit, Chapeau bas, de Barbara reste une de mes chansons fétiches. Quel sens de l’émerveillement :
« Est-ce Dieu, est-ce Diable
Ou les deux à la fois (…)
Mais pour tant de beauté
Merci, et chapeau bas ! »
– Selon vous, Dieu aime-t-il les chansons ?
Evidemment ! Il ne serait pas Dieu sinon. D’ailleurs, certains matins, par vents favorables, je l’entends chanter dans la salle de bain céleste… Et vous savez ce qu’il chante ? Demandez à Jean-Pierre Ferland et Marie-Hélène Thibert :
« C’est beau, c’est beau
Si tu voyais le monde au fond, là-bas
C’est beau, c’est beau
C’est beau ».
.- Au paradis quelles musiques y entend-on ?
Ça dépend vraiment des départements.
Certains bienheureux, pour tenter de le rester, et parce qu’ils pensent que, même au paradis, il faut encore évangéliser, se sont trouvé un petit coin où ils peuvent écouter « les prêtres » ou « les sœurs ». Normal quand on met à l’affiche « In Paradisium ».
Mais ce serait bien mal connaître la maison que de la croire attachée aux seuls artistes ensoutanés. On y entend aussi Enya au paradis, Loreena Mc Kennitt, Montserrat Figueras pour les plus exigeants… Sans parler des fans de Mannick qui y sont très nombreux ! Il y en a même quelques-uns qui écoutent Carla Bruni…
– Que chantent les anges musiciens ?
De tout ! Absolument de tout. On oublie souvent que leurs prestations officielles ne sont pas tellement nombreuses : Noël, évidemment, et, de temps en temps, même si elle tombe un peu en désuétude, « La messe des anges »… Pour le reste… très éclectique les anges musiciens. Entre la Passion selon saint Matthieu de J.-S. Bach dans la version de Philippe Herreweghe, et les magnifiques polyphonies d’Arvo Pärt… il leur arrive de chanter Nourith (Yeroushalaym shel Zahav), ou le Trio Joubran (ils sont très œcuméniques !). On les entend même accompagner Fabienne Thibeault dans la chanson « Les uns contre les autres ». Sans compter qu’ils viennent de découvrir une chanson de Louis Chedid, » On ne dit jamais assez aux gens qu’on aime qu’on les aime. » Un malheur, Louis Chedid au paradis ! Sans oublier, « La valse des anges », bien entendu. Pure (Liane) Foly… sur terre.
– Si la prière était une chanson laquelle choisiriez-vous ?
Là j’ai vraiment l’embarras du choix… Surtout quand l’actualité frappe à la porte. La prière de Brassens, par exemple ou la Maudite prière de Linda Lemay qui parvient à traduire avec tant de justesse le vécu le plus difficile de ses contemporains. Mais le choix numéro un, sans hésiter, Lemay encore, je l’accorde à cette autre prière : « Donnez-lui la passion ». Bouleversant.
– Qu’aimeriez-vous chanter à Dieu en le rencontrant ?
Je crois que je lui chanterais, avec Charles Aznavour : « Merci mon Dieu ». Ou alors, mais oui, je me vois, comme la chanteuse Maurane, m’interroger avant d’être devant lui : Qu’est-ce que je vais te dire ?
– Quelles sont dans votre discothèque personnelle les chansons qui sont vos préférées. Les dix chansons à emporter sur une île déserte?
Jean-Pierre Ferland / Daniel Mercure
Y’a pas deux chansons pareilles interprétée par Gilles Vigneault.
Serge Gainsbourg, La chanson de Prévert.
J’aime aussi l’interprétation de Juliette Gréco !
Jacques Brel, Mathilde
Raymond Lévesque, Quand les hommes vivront d’amour interprétée par Fabienne Thibeault.
M. Fanon / G. Jouannest, Mon fils chante interprétée par Juliette Gréco
Georges Brassens, Chanson pour l’Auvergnat
Linda Lemay, La centenaire
Barbara, Nantes
Jean Ferrat, Les cerisiers
Mannick, Ma vie après ma mort
– Quel est le refrain qui vous a le plus marqué ?
Le refrain de « Que serais-je sans toi? » quand Ferrat chante Aragon.
– Quels sont les grands auteurs, compositeurs ou interprètes qui comptent pour vous ?
Dans le désordre… mais plusieurs sont déjà présents dans les dix chansons citées. Barbara, Brel, Brassens, Ferrat, Ferre, Gréco, Lemay, Nougaro… Je peux y ajouter Hélène Ségara (« Quand l’éternité », par exemple), Liane Foly, Enzo Enzo, Pierre Perret, Louis Chedid… Ne pas oublier mes compatriotes : Maurane et Julos Beaucarne. Et bien entendu, Mannick !
– La dernière fois où vous avez été ému en écoutant une chanson, laquelle était-ce ?
Mais précisément, Mannick dans « Le parfum d’un je t’aime ». Si je pouvais en choisir deux, je dirais aussi son interprétation de Gueules cassées dans le CD « Mannick autrement » (ADF).
– Si Dieu était une chanson laquelle serait-ce ?
Je le vois bien « Aimer à perdre la raison », Dieu, avec Ferrat et Aragon. A moins qu’il ne soit » l’Accordéon » de Gainsbourg. Mais comme Dieu est peut-être une femme… qui sait s’il ne cache pas quelque part « Les parfums d’autrefois » de Liane Foly. Ou alors, ce serait lui qui nous chante « Méfie-toi de moi » avec Hélène Ségara. Pas impossible « Quand l’éternité / change nos vies inachevées / En amour qui ne meurt jamais ».
Le site de Gabriel Ringlet: http://www.gabrielringlet.be/
Le prieuré: http://www.leprieure.be/
Mannick-Gabriel Ringlet sur le site des écrivains croyants: http://www.ecrivainscroyants.fr/2011/11/03/gabriel-ringlet-et-mannick-entre-toutes-les-femmes/
Mon commentaire Merci Yann pour votre ouverture du coeur
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