Frédérick Casadesus. Journaliste, écrivain.
Bravo à l’hebdomadaire protestant d’actualité, « Réforme » d’avoir consacré un dossier spécial, à l’heure d’été, à la chanson. Sous le titre « Chanter la vie ». Où l’on découvre aussi les goûts en matière de chansons de quelques figures connues du Protestantisme. Un des chefs d’orchestre de cet hommage à un art majeur et populaire est Frédérick Casadesus. Journaliste et écrivain. Né en 1959, fils de Christian Casadesus, comédien et frère de la comédienne Gisèle Casadesus, il est issu d’une lignée d’artistes. Dans l’édito de « Réforme » il revient sur ces chansons qui » ouvrent une fenêtre sur le monde » (Voir ci-dessous). Il tient également un blog sur le site de Mediapart, sous le titre « A la musique ». https://blogs.mediapart.fr/frederick-casadesus/blog
“En un clin d’œil, les chansons vous ouvrent une fenêtre sur le monde.”
Notre journal s’encanaillerait-il ? En vous parlant de chansons, qui plus est pendant l’été, nous avons voulu marquer quelque pas de côté, prendre une distance avec nos habitudes. La gravité de notre époque attendra.
D’ailleurs la ritournelle est-elle aussi futile ? Amateur assumé, François Truffaut fait dire à l’une de ses héroïnes : « Les chansons disent toujours la vérité. » Qu’elles évoquent l’amour ou la guerre, elles nous assènent avec efficacité nos quatre vérités : grandeurs et misères, douleurs, élans de joie, rencontres improbables.
En un clin d’œil, elles vous ouvrent une fenêtre sur le monde. Comment pourrions-nous résister à cette manière de se rendre populaire, de rassembler toutes les classes sociales, de provoquer la liesse collective ? Notre désir est donc de rendre hommage à cette forme d’expression, sans plus de façon.
Mais nous voulons célébrer ceux dont la passion consiste à produire cet émerveillement. Les chanteuses et les chanteurs, bien entendu, mais aussi les compositeurs, les auteurs, les arrangeurs et les musiciens de studio, ces artistes trop souvent méconnus du grand public mais dont l’apport est essentiel à la réalisation d’un disque ou d’un spectacle. Avec beaucoup de sincérité, ces experts ont bien voulu nous dévoiler, non point des secrets, des recettes, mais des chemins.
Dans ce domaine comme dans toute activité professionnelle – eh oui, chanter, construire une chanson, c’est un métier singulier, mais c’est un métier – le travail est un viatique indispensable à toute réussite.
Il y faut encore un don, pour mieux dire une grâce, capable de changer le labeur en lumière. La chanson serait-elle protestante ? Allons… Ne nous caricaturons pas. Sachons goûter simplement ce plaisir innocent.
Pour qui fut bercé de chansons avant que de venir au monde, comme tant d’autres, ce numéro parle une langue maternelle. »
https://www.reforme.net/editoriaux/refrain-de-lete-ledito-de-frederick-casadesus/
************
– Quelles sont les musiques, anciennes ou récentes, évoquant Dieu que vous avez entendues et appréciées?
– Frédérick Casadesus: Tout Bach et tout Messiaen.
– Selon vous, Dieu aime-t-il la musique ?
Je l’espère; mais je suis certain que l’inverse est vrai.
–Au paradis quelles musiques y entend-on ?
« L’offrande musicale » de Bach, la sonate opus 110 de Beethoven, le chœur de « Daphnis et Chloé » de Ravel -celui qui précède la danse et le lever du jour- et le « Catalogue des oiseaux », d’Olivier Messiaen.
– Quelles sont les musiques qui, selon vous, invitent à la prière ?
Le 20ème prélude, en do mineur, de Chopin
– Que chantent les anges musiciens ?
Je pense que le théologien protestant Karl Barth a dit quelque vérité quand il a déclaré: « Je ne suis pas sûr que les anges, lorsqu’ils sont en train de glorifier Dieu, jouent de la musique de Bach, mais je suis certain, en revanche, que lorsqu’ils sont entre eux, ils jouent du Mozart, et que Dieu aime alors tout particulièrement les entendre »
–Si la prière était une chanson, une musique, laquelle choisiriez-vous ?
Le 20ème prélude, en do mineur, de Chopin.
– Qu’aimeriez-vous « chanter » à Dieu en le rencontrant ?
« Le sirop de la rue », de Renaud – dont la musique est signée de Julien Clerc.
– Quelles sont dans votre discothèque personnelle les musiques, les chansons qui sont vos préférées. Les dix musiques et chansons à emporter sur une île déserte?
1°) « Paris je t’aime », interprété par Maurice Chevalier, que je tiens pour le plus grand chanteur de variété française.
2°) « A Paris », de Francis Lemarque, interprété par Yves Montand.
3°) « Je me souviens », adaptation d’un poème d’Aragon extrait du « Roman inachevé », mise en musique par Philippe-Gérard, interprétée par Yves Montand, Bob Castella se révélant, comme toujours, impérial au piano.
4°) « Heureux le marin qui nage » d’Étienne Roda-Gil et Julien Clerc, orchestration d’un certain Bill Shepherd dont j’ai toujours pensé qu’il s’agissait du pseudonyme d’un arrangeur français…J’ai ma petite idée, mais ne puis rien en dire publiquement.
5°) « Barcelone 36 », texte bouleversant de Roda-Gil, musique de Jean-Pierre Bourtayre et Jean-Claude Petit – qui est aussi l’arrangeur de la chanson- interprétée par Julien Clerc dans le cadre d’un concept-album qui n’a pas eu de succès : « 36 Front Populaire ».
6°) « Quand j’étais chanteur », de Roland Vincent, Michel Delpech et Jean-Michel Rivat, l’orchestration de Michel Bernolc – son chef d’œuvre absolu, que l’on songe au contre-chant fredonné en « yaourt »- et la prise de son de Dominique Blanc Francard.
7°) « La mémoire et la mer » de Léo Ferré, orchestrée par Jean-Michel Defaye évidemment. Quelque chose comme une somme.
8°) « Mathilde » de Gérard Jouannest et Jacques Brel, interprété par icelui. Selon moi la plus grande chanson d’amour jamais écrite. Des sources dignes de confiance indiquent que l’enregistrement studio de cette chanson correspond à une première prise de répétition, à l’issue de laquelle Brel a déclaré qu’il ne pouvait mieux faire.
9°) « Quartier des Halles », texte de Bernard Dimey, musique d’Hubert Degex, interprétée par les Frères Jacques. Tout y est sublime : les images du poète, les modulations du pianiste-compositeur et bien entendu le groupe vocal, éternel.
10°) « Traces de toi », d’Alain Chamfort et Didier Golemanas, pas seulement pour la ritournelle et pour l’orchestration de Wally Badarou : surtout pour l’arrangement des voix, le chef d’œuvre des frères Georges et Michel Costa, formidables choristes de variété trop peu connus du grand public.
– Quel est le refrain qui vous a le plus marqué ?
« Le plat pays », de Jacques Brel.
– Quels sont les grands auteurs, compositeurs ou interprètes qui comptent pour vous ?
Léo Ferré, Jacques Brel, Etienne Roda-Gil parmi les auteurs, Jean-Michel Defaye, Jean-Claude Vannier, Jean-Claude Petit et Christian Gaubert parmi les arrangeurs-compositeurs, Ferré, Brel, Gilbert Bécaud, Julien Clerc et Michel Delpech parmi les interprètes.
– La dernière fois où vous avez été ému en écoutant une musique, une chanson, laquelle était-ce ?
« Les neiges de Finlande », interprétée par Edith Piaf, dont le texte formidable d’Henri Contet a sans doute influencé, même involontairement, Bernard Dimey quand il a écrit « Syracuse ».
– Si Dieu était une chanson, une musique, laquelle serait-ce ?
« La bataille sur la glace » extraite de l’Oratorio Alexandre Nevski de Prokofiev – j’ai une préférence pour l’interprétation de l’orchestre symphonique de l’URSS placé sous la direction de Ievgueni Svetlanov.
*********
Laisser un commentaire